Djeukam Tchameni et l'opération Exodus

 

 

OPERATION EXODUS : LES FAITS

En 1993, 35 leaders étudiants sont exclus de l’université de Yaoundé. Ils sont obligés de rentrer en clandestinité car ils sont également recherchés par la police politique. Traqués et sans avenir scolaire, les « parlementaires » adressent un SOS a tous les leaders politiques de l’époque. Dans leur SOS, ils formulent des demandes précises :
1- Trouver un pays qui leur accorde l’asile
2- S’inscrire dans des universités pour poursuivre leurs études 
3- Obtenir des bourses pour financer ces études
De tous les leaders politiques contactés, seul M. Djeukam Tchameni président de CAP Liberté en exil au Burkina Faso répond favorablement et concrètement au SOS des etudiants. La bonne nouvelle se répand dans les réseaux clandestins et par petits groupes les etudiants se dirigent vers le Burkina Faso via le Nigeria, puis le Benin ou le Dr Jules Nebo responsable local de CAP liberté les aiguille vers la frontière du Faso. Dès qu’ils mettent les pieds sur le sol burkinabè, les autorités locales les acheminent vers la capitale Ouagadougou où les attend leur bienfaiteur.

A Ouagadougou, Le Président de Cap Liberté, par ailleurs Directeur Général de la société INTELAR-Burkina, souhaite la bienvenue aux étudiants. Il explique au premier groupe qui arrive qu’il a marqué de son accord et s’est préparé pour recevoir 15 étudiants et que dès qu’ils seront tous là, il mettra en œuvre son plan qui consiste à 1) introduire et suivre leur dossier auprès du HCR, 2) les inscrire à l’Université, et 3) obtenir des bourses d’études pour eux. En attendant que ces procédures aboutissent, il les loge et les nourrit à ses frais. Il a loué à cet effet une grande villa de 3 chambres non loin de l’université de Ouagadougou.

Deux problèmes se posent dès les premières semaines : Au lieu des 15 étudiants attendus, Mr Tchameni voit déboucher 33 étudiants fatigués par le voyage et traumatisés par la clandestinité au Cameroun. Ces derniers lui expliquent alors qu’il est le seul à avoir répondu favorablement à leur SOS raison pour laquelle ils se sont tous dirigés vers le Pays des Hommes Intègres. Magnanime le bienfaiteur dit qu’il fera les ajustements nécessaires pour accommoder tout le monde et demande aux étudiants d’être calmes et patients car ce gonflement des effectifs va certainement créer des retards.

Le deuxième problème est qu’à fur et à mesure que les étudiants arrivent au Faso, des conflits de plus en plus violents naissent entre eux. Ces conflits étaient essentiellement des vieilles querelles idéologiques et de leadership qui existaient depuis le Cameroun au sein du Parlement et qui n’avait rien à voir avec Mr Djeukam Tchameni. Ces querelles qui dégénéraient parfois en bagarres ternissent leur image de réfugiés politiques, embarrassent au plus haut point leur hôte et surtout, mettent en danger la réussite de l’opération Exodus.

Il faut se rappeler que nous avions été exclus de l’université sous le prétexte que le Parlement avait ordonné l’exécution de leur Camarade Djengoue Collins mort calciné dans sa chambre dans une mini-cité. Mr Djeukam Tchameni avait dû faire des pieds et des mains pour convaincre le Président du Faso que ces étudiants étaient non pas des criminels en fuite, mais des nobles combattants de la liberté persécutés injustement par un régime liberticide. Les fréquentes et violentes confrontations faisaient apparaitre tous les étudiants comme des délinquants capables de pires exactions. Et du coup, Mr Djeukam Tchameni paraissait au mieux comme un leader négligent qui s’était fait rouler par des jeunes voyous, et au pire comme un menteur qui couvrait leur « crime ».

En tout cas le recteur de l’université de Ouagadougou eut vent de des bagarres car les « parlementaires » étaient loges non loin du campus. Il écrit au Président du Faso pour dire qu’il ne souhaitait pas les accueillir sur son campus à cause de leur violent tempérament. Il voulait donc annuler nos inscriptions a l’université, ce qui aurait fait échouer l’opération Exodus. Alerté, Mr Djeukam Tchameni est allé voir le President du Faso et lui a demandé un sursis, lui promettant de calmer ses petits frères, ce à quoi le Président a répondu que si les étudiants ne se calmaient pas il allait les chasser tous du Burkina Faso.

Devant cette situation Mr Djeukam Tchameni a pris une série de mesures : Il a déménagé les étudiants de la villa du centre-ville vers un camping à 10 km de Ouaga et il a eu une réunion avec tous les étudiants et nous a dit en substance ceci : « Je me suis engagé à vous aider à obtenir le statut de réfugié politique au Burkina Faso, a vous inscrire a l’université afin que vous terminiez vos études et à vous obtenir des bourses pour vous soutenir pendant vos études. Pour réussir, j’ai besoin que vous restiez calmes pour 2 mois. Je ne veux plus entendre parler de vos querelles idéologiques et de leadership. Vos diverses organisations sont transparentes pour moi. Ce que j’ai devant moi ce sont des jeunes frères à qui j’ai fait trois promesses et j’entends les réaliser. Le Président du Faso menace de vous chasser tous du Burkina Faso et je lui ai promis que vous serez sages. Ceux qui veulent continuer à bénéficier de ma protection doivent s’engager ce soir à ne plus polémiquer, à ne plus bagarrer et à ne plus vadrouiller hors du camping sans l’autorisation du logeur. Des que vous aurez votre statut, votre inscription et votre bourse, vous servez libre de faire ce qu’il vous plait ; mais pour le moment restez calmes ». Vingt-trois des 33 étudiants ont promis de rester calmes. Neuf ont déclaré ne pas avoir besoin de la protection de Mr Djeukam Tchameni et ne pas vouloir se soumettre à son « diktat ». Quelques jours après, le Président du Faso met en exécution sa menace et expulse les neuf étudiants du Burkina.

Le départ des neuf expulsés amène un calme relatif au sein du groupe et l’opération Exodus se termine avec un succès total : Tous les étudiants obtiennent le statut de réfugié politique, ils sont inscrits à l’université et éventuellement reçoivent tous une bourse de 85 000 par mois. Fin 1994, c’est un homme très satisfait d’avoir accompli avec succès une mission humanitaire qui quitte le Burkina Faso pour aller faire des études au Graduate School of Political Management aux Etats Unis.

A la faveur de multiples supplications auprès des autorités du Burkina, Quatre des neuf expulsées sont réadmis à Ouagadougou. Mr Djeukam Tchameni n’ayant pas retiré leurs dossiers des différents circuits, ceux-ci peuvent bénéficier des mêmes avantages que leurs camarades restés sur place. Dès le retour des expulses, les tensions renaissent et s’amplifient au sein des étudiants camerounais qui finissent par se scinder en deux groupes. Le groupe de 10 mené par les anciens expulsés travaillent avec un groupe d’étudiants burkinabè pour organiser en 1995 sur le campus de Ouagadougou une manifestation d’une violence sans précédent au Faso. Par un arrêté signé le 2 Octobre 1995 par le Ministre de l’Administration Territoriale, les 10 étudiants camerounais seront expulsés du Burkina Faso.

La vingtaine qui restent au Faso poursuivent leurs études avec succès et par la suite obtiennent pour la plupart une bourse pour aller faire des études de 3eme cycle aux Etats Unis d’Amérique.

Sur la base des faits indéniables et vérifiables cités ci-dessus, nous pouvons donc répondre aux 10 questions :
1- Comment est-ce que les « parlementaires » sont arrivés au Burkina ? 
A l’appel de Mr Djeukam Tchameni qui a été le seul leader politique à répondre à leur SOS
2- Combien étaient attendus par Mr Djeukam Tchameni ? 
15 étudiants étaient attendus mais 33 se sont présentés à l’appel. Mr Tchameni a l’époque âgé de 32 ans et père de 2 enfants se retrouve subitement avec 35 enfants à nourrir.
3- Qui les a reçus, hébergés et nourris jusqu’à ce qu’ils aient leurs bourses ? 
Mr. Djeukam Tchameni
4- Qui les a inscrits à l’Université ? 
Mr. Djeukam Tchameni
5- Qui a obtenu pour eux le statut de refugies politiques et des bourses d’études ? 
Mr. Djeukam Tchameni
6- Sur les 33 étudiants combien ont été expulses en 1993 ? 
9 sur 33. Les 23 autres sont restés au Burkina et ont reçus statut de refugies politiques, inscription à l’université et bourses d’études.
7- Par qui et pourquoi ont-ils étaient expulses ? 
Ils ont été expulses par les autorités Burkinabè qui leur reprochaient les confrontations violentes qu’ils orchestraient, comportement incompatible avec leur statut de refugies politiques.
8- Est-ce que certains des expulses sont réadmis au Burkina Faso ? 
Oui grâce à l’intervention de l’ambassadeur du Burkina au Mali, ami personnel de Mr Djeukam Tchameni qui l’informe de sa démarche et obtient son aval
9- Quand est-ce que Mr Djeukam Tchameni quitte le Burkina Faso?
Mr Tchameni quitte le Burkina pour les Etats Unis en fin 1994

10- Y’a-t-il une deuxième expulsion ? si oui, quand et dans quelles circonstances ?
Oui, dix étudiants camerounais ont été expulses en octobre 1995. Les autorités burkinabè leur reprochent d’avoir participé à l’organisation d’une manifestation estudiantine d’une violence inouïe, jamais vue au Burkina Faso. Parmi ces dix étudiants se trouvent ceux qui avaient été réadmis après leur expulsion en 1993

On peut donc conclure que l’opération Exodus est une action humanitaire menée avec succès par Mr Djeukam Tchameni pour aider ses petits frères en détresse. Une vingtaine d’étudiants ont eu la sagesse de profiter de cette manne pour finir leurs études et se construire un avenir radieux. Une poignée de délinquants juvéniles n’a pas su se saisir de cette opportunité et de par leurs propres turpitudes, ils se sont fait expulses DEUX FOIS du territoire burkinabè pour activités incompatibles avec leur statut de réfugiés politiques. Ils ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes. Ce que l’histoire retiendra c’est la générosité et le sens de sacrifice d’un jeune leader politique de 32 ans qui a pris sur lui d’aider avec ses moyens propres et de façon altruiste une vingtaine étudiants Camerounais en détresse.

 

 

Guy Tchuileu

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